Mes pas timides suivent le sentier de la forêt. Et les hauts arbres au-dessus de moi unissent leurs branches pour que je sente leur protection. Jour par jour, je suis obligée de lutter contre ce quotidien dépourvu de toute couleur, si noir et si ennuyeux que ni Picasso n’arriverait à l’animer. Aujourd’hui il sera différent. Aujourd’hui, en avançant vers les sommets des montagnes, vers une vie rose, nuancée de la réussite et de la satisfaction, mon âme laissera les déceptions à l’ombre de ma personnalité et la joie brillera dans mes yeux. Au sommet, en atteignant la fleur du succès et en inspirant son parfum, j’aurai trouvé ma paix.
Mais j’y arrive et je ne le suis pas.
Cette hauteur m’étourdie et le vertige vainc mon équilibre. Tombée sur le mousse, je ferme mes yeux et j’attends que le soleil bronze ma peau et que la caresse de la réussite accapare mon cœur. Autour de moi, les oiseaux font danser les notes musicales et l’enthousiasme flotte dans l’air. Le parfum des fleurs envahit mon corps et je sais qu’ici je devrais être contente. Cette randonnée a été destinée à la découverte de moi-même et je dois en profiter. Néanmoins, tout à coup, je commence à sentir la chaleur brûler mon visage. Je réalise qu’en essayant d’échapper de ma zone de confort, je suis devenue un intrus dans ma propre vie.
Moi, je veux quitter cette illusion de l’accomplissement avec laquelle j’ai nourri mon espoir pour si longtemps. Je les ouvre et une infinité bleue se reflète dans mes yeux marrons. Un nuage pétillant se promène, en tâchant le ciel avec de nuances blanches et je m’y accroche dans la quête d’un dépaysement, d’une autre vie. Je me libère de toute tristesse et je vole dans l’inconnu, en espérant que le destin saura à guérir les blessures de mon cœur. Par la suite, je me retrouve toujours devant une infinité bleue, mais sous une forme différente.
La voix de la mer m’appelle et les vagues se courbent, en allongeant leurs mains froides afin de me capturer. Leur chanson fait danser mes sentiments car son simplicité laisse de l’espace pour dessiner mes aspirations. Le cri d’une mouette remplit les ondes sonores de l’horizon et sa liberté tremble dans ce désert, mais je ne me sens guère seule.
Je me sens heureuse.
Bien que les coquilles brisées frottent mes pieds, la douleur ne semble que m’ambitionner. J’avance sans hésitation vers tous ces signes que la mer me transmet et un sentiment spontané de paix me surprend. Le quotidien n’est plus noir, il a pris les couleurs pâles de la mer. Devant ma perception, il est devenu rose.
Ainsi me laisse-je volée par l’ambiant de la mer, par ce bonheur situé aux pieds de ma vie que je n’arrivais à trouver sur les sommets du succès. J’ai passé parmi les jours de ma vie en espérant de trouver quelque chose que je possédais déjà, mais que j’avais choisi à ignorer.