Robert Grigore (photo ci-dessus) est étudiant en première année à l’Université de Bucarest, en Roumanie. Comme au lycée il était passionné par l’histoire, il mélange désormais cette passion pour le passé avec son désir de devenir diplomat. Son programme d’étude, Relations Internationales et Histoire Universelle, est un programme dual qui mélange à la fois l’apprentissage de l’histoire avec des études des relations internationales. À l’invitation du magazine POV 21, il a accepté de répondre à quelques questions.
Pov 21: Qu’est-ce qui vous a déterminé à choisir un parcours académique qu’on pourrait considérer comme non conventionnel? Pourquoi l’histoire ou les relations internationales dans une université réputée du domaine?
Robert: J’ai choisi ce programme d’études par passion. J’ai découvert cette passion au lycée à l’aide de ma professeure d’histoire. C’est grâce à elle que j’ai commencé à participer à de nombreuses compétitions, et que je suis devenu de plus en plus laborieux et compétitif. En terminale, j’ai remporté le prix pour le meilleur essai d’histoire de ma région, alors j’ai réalisé que je suis peut-être doué dans ce domaine. Je me souviens que tout au début, je rêvais de devenir policier, mais j’ai finalement réalisé que l’uniforme bleue n’était pas pour moi. Mais je voudrais faire encore quelque chose d’important.
Je me suis inscrit à l’Université de Bucarest et j’ai choisi cette voie, au détriment des autres, pour l’histoire carrément… puis, j’ai commencé à me voir une belle carrière de diplomate en face. Or, pour ce type de carrière, il te faut une culture générale très vaste, et avec l’histoire on peut créer une telle culture. Donc pourquoi pas faire les deux en même temps? Maintenant, bien sûr, on peut dire que c’est un chemin assez peu conventionnel, mais je pense que si vous travaillez dur, rien n’est impossible.
Pov 21: Certains jeunes à votre place auraient peut-être dit : L’histoire est bien ennuyeuse, c’est pour ceux qui aiment la poussière des archives, moi, je veux m’occuper du présent, ou voir avec l’avenir, donc je ne ferai point d’histoire? Croyez-vous qu’ils seraient intéressés par un programme d’étude comme celui-ci ?
Robert: Une personne qui veut travailler dans le domaine de la diplomatie, ou dans les relations internationales doit bien connaître certaines choses, donc l’histoire. Effectivement, il y a beaucoup de gens qui disent “pourquoi se concentrer sur l’histoire? C’est du passé, moi je veux du présent je m’en passerais sans apprendre ce truc. C’est quand même faux, je dirais!… J’ai lu récemment cet article de psychologie et j’ai découvert une parallèle que j’aime bien. Cela ressemble à ceci: un psychologue ne peut pas comprendre les traumas d’une personne sans analyser tous ses souvenirs, dès l’enfance jusqu’à présent. De même, un expert dans tout ce qui tient de la sphère internationale doit analyser l’évolution historique des choses, afin d’en avoir une vraie vue d’ensemble. Si vous voulez changer le monde, vous devez d’abord le comprendre.
La réalité est que dans le domaine des relations internationales, on croise toujours l’histoire. Par exemple, il y a certains problèmes historiques qui se perpétuent au fil du temps. C’est pourquoi je pense que l’étude de l’histoire est essentielle dans ce domaine.
Pov 21: Vous êtes entré en première année avec quelques attentes et quelques idées sur le domaine, comment ont-ils changé après une année d’études? Comment voyez-vous les choses maintenant ?
Robert: Quand vous arrivez à l’université, vous n’arrivez pas à réaliser à quel point vous changerez. Quand vous allez du lycée à la fac, vous ne réalisez pas le saut que vous venez juste de faire, c’est avec le temps que vous comprenez. Je crois qu’avec ce changement vous devenez vraiment adulte et de là les changements.
À vrai dire, je suis entré à la fac avec certaines attentes et ensuite j’ai rencontré les gens de la fac, tant d’étudiants que de professeurs. Je ne dirais pas que ma vision a changé a 180 degrés. J’ai beaucoup appris, mais je suis encore au début, j’ai encore beaucoup à apprendre. Lentement et peut-être un peu timidement, je commence à façonner ma perspective sur l’avenir, en attendant de grandir en tant que personne et sur le terrain, dans des stages. Ce que je sais avec certitude, c’est que j’aime ce que j’étudie à présent. Et je pense que c’est le plus important .
Pov 21: Quels sont vos projets pour l’avenir et comment comptez-vous utiliser ce que vous avez appris ?
Robert: Je voudrais surtout une carrière dans la diplomatie. Je suis très passionné par ce domaine maintenant. En termes de carrière, je pense que la chose la plus importante est de pratiquer la profession qui nous attire. J’ai remarqué qu’aujourd’hui, les gens ont tendance à qualifier un domaine professionnel de «mauvais» ou «bon». Les gens ont des préjugés sur certaines professions. De mon point de vue, il n’y a pas de bons ou de mauvais emplois. Tout domaine d’activité est vital pour l’économie d’une société. Peu importe votre travail, il est important de le faire bien, pour parvenir a s’y identifier. Quant à moi, ma principale option serait une carrière diplomatique, mais en même temps j ai pensé à une carrière d’enseignant ou dans la recherche.
Pov 21: Vous dites que vous voulez travailler dans la diplomatie, ça veut dire que vous envisagez quitter la Roumanie, n’est-ce pas?
Robert: Si je réussis ce que je me propose, bien sûr! Il y aura certaines périodes quand j’envisage quitter le pays, mais je ne veux pas m’installer définitivement ailleurs. Si j’en ai l’occasion, je choisirai également d’investir en Roumanie. Pour moi, la Roumanie signifie, avant tout, chez moi. C’est naturel de toute façon, je pense en roumain et je connais ce que pensent les Roumains! De plus, j’aime vraiment ma patrie. Je crois que j’aurais du mal à la quitter définitivement.
Pov 21: Et comment un étudiant en relations internationales voit-il la situation en Roumanie ces dernières années ?
Robert: Tout d’abord, j’ai remarqué une évolution que j’aime beaucoup. Le fait que l’opinion publique roumaine s’implique de plus en plus dans le débat politique. Les roumains deviennent plus curieux, plus informés et n’évitent plus de réclamer leurs droits. Je pense que cet aspect est particulièrement important dans une société démocratique. Bien sûr, nous avons actuellement autant d’informations grâce à la presse et à l’Internet. Et il est important de savoir comment éviter certaines fausses informations qui y circulent.
Deuxièmement, il me semble que la classe politique est également très divisée. Je ne vois rien de mal à la compétitivité. Nous vivons dans une société démocratique, et chaque parti doit présenter son programme pour être élu. C’est juste que lorsqu’il s’agit de travailler pour le bien du pays, je pense que la place de la concurrence doit être prise par la solidarité. Les partis politiques roumains devraient collaborer davantage à cet égard, indépendamment des certaines opinions divergentes.
Pov 21: Mais vous, qu’est-ce que vous aimeriez changer si vous le pouviez?
Robert: Si je pouvais faire un changement majeur, mon premier objectif serait l’éducation. En tant qu’ancien élève, je peux dire que le système éducatif en Roumanie a des problèmes. Je pense que, l’école devrait mettre finalement davantage l’accent sur le développement personnel des élèves. Nous ne réalisons même pas à quel point cela nous manque. C’est pas dans l’Occident là-bas. Et puis, ce serait très bien que les élèves apprennent dès l’école primaire comment exprimer leur opinion sur un certain sujet. Car ils ont peur ici. Je connais beaucoup de jeunes qui, lorsqu’ils doivent parler en public, sont paralysés, car ils n’ont tout simplement pas cette habitude.
Et les cours pourraient devenir plus interactifs aussi. L’école doit identifier les qualités et les compétences des élèves, puis les aider à les développer. Il serait très indiqué d’avoir déjà de l’éducation économique, juridique ou bien politique dans les écoles … du moins des choses générales!
POV 21: Il y a cette idée que rien ne sort des relations internationales ou des études politiques. Même si vous ccartonnz à la fac, personne ne vous embauchera sur le terrain parce qu’en Roumanie il faut avoir de l’argent et de l’influence pour aller quelque part? Comment expliquez-vous le fait que beaucoup de gens aient cette idée?
Comme je l’ai dit, les gens ont parfois tendance à classer les professions comme «bonnes» et «mauvaises». Financièrement, on dirait de «sûres» et de «moins sûres».
Robert: Comme je l’ai dit, les gens ont parfois tendance à classer les professions comme «bonnes» et «mauvaises». Financièrement, on dirait de «sûres» et de «moins sûres». Depuis un certain temps maintenant, certains évitent l’étude des sciences humaines, en estimant que cela ne peut leur garantir une carrière dans le futur. On remarque également que certaines personnes sont extrêmement réticentes lorsqu’il s’agit d’une carrière en diplomatie ou en politique. Beaucoup voient la diplomatie ou la politique comme une caste, et seulement les personnes riches et puissantes puissent y arriver. Cette idée n’est pas forcément vraie. Malheureusement, en Roumanie, nous avons également des problèmes de qualité de la classe politique. Ça fait que ces domaines sont perçus en termes de préjugés. Mais je vais travailler dur et faire de mon mieux pour y réussir.